Cette ruse des tyrans d'abêtir leurs sujets n'a jamais été
plus évidente que dans la conduite de Cyrus envers les Lydiens,
après qu'il se fut emparé de leur capitale et qu'il eut pris
pour captif Crésus, ce roi si riche. On lui apporta la nouvelle
que les habitants de Sardes s'étaient révoltés. Il
les eut bientôt réduits à l'obéissance. Mais
ne voulant pas saccager une aussi belle ville ni être obligé
d'y tenir une armée pour la maîtriser, il s'avisa d'un expédient
admirable pour s'en assurer la possession. Il y établit des bordels,
des tavernes et des jeux publics, et publia une ordonnance qui obligeait
les citoyens à s'y rendre. Il se trouva si bien de cette garnison
que, par la suite, il n'eut plus à tirer l'épée contre
les Lydiens. Ces misérables s'amusèrent à inventer
toutes sortes de jeux si bien que, de leur nom même, les Latins formèrent
le mot par lequel ils désignaient ce que nous appelons passe-temps,
qu'ils nommaient Ludi, par corruption de Lydi.