Il y a quelque chose de commun à toute harmonie, à toute vision de beauté, de sensation de sacré, de juste, de vrai, d'immense et d'incorruptible. Il y a toujours une brume impalpable qui rappelle à soi moi-même son origine véritable. La brume apporte avec elle amour et apaisement. Elle est l'or du dehors qui s'infiltre dans les méandres de la personnalité brute et matérielle comme un filet d'eau fraiche et pure qui s'enfonce dans les replis de la terre. Elle est bonheur, car rien ne dépent d'elle et elle est tout.
Le pouvoir est comme une brume, qui s'accumule dans le silence et l'obscurité, et que le a vie arrache comme l'herbe folle arrache la rosée. La brume, extrêmement sensible, se voit repoussée toujours plus loin dans les cieux, osant s'approcher des mortels lorsque seulement leur agitation s'arrête. La mort appelle cette brume, cette fine énergie, comme un parfum d'éternité.
Un corps dépourvu d'agitation, des émotions qui ont fait retour à leur racine, et un esprit libre de toute idée, sont les conditions qui permettent à l'esprit de revenir, magnétiquement attiré. Le vide est le terrain sur lequel il s'accumule, comme un silence qui pèse jusqu'à réconforter, rétablissant l'harmonieux, le lien perdu. Toute la vie durant, l'irritation des vents de la manifestation empêchent à l'esprit de s'installer, se construire et former le tout qui serait celui d'un nouvel organisme spirituel.
Le merveilleux tient en horreur le vain, le futile, le corruptible, salissant le pur et détériorant même le métal le plus précieux. La lumière s'éteint dans les courses insensées, qui apportent fardeaux et poussières, et que la pluie transforme en une boue noire et glauque que seules les âmes terrestres peuvent contenir tant cette mixture est puante et vile.
La vérité se trouve là où ce monde s'évanouit, lorsqu'il ne reste plus que soi et le soleil, qui brûle la peau dans l'air glacé, rayonnant un rêve intact et nourrissant, et rien d'autre. Le corps absorbant cette vérité comme un mets rare et magique, éclot parmi les ondes de la source, apportant à ceux qui n'ont rien la vision du néant infini, du soi sans nom connu de toute éternité. Tel un fleuve abreuvant les animaux qui franchissent l'unique porte réparatrice, non maligne, ce baume retourne à l'esprit, le guérit, grâce à la mort ayant dispersé les folies temporelles et mondaines, et autres haïssables et imprudentes fatigues.
Tant de mots pour dire ce qui ne peut être dit, pour révéler ce dont les lettres ne peuvent s'approcher se consumer elles-mêmes. Les illusions ne laissent ni trace, ni fumée; naissant du vide, le vide les reprend. Le vide ne peut être approprié, mis au service d'ambitions ponctuelles, sans se perdre. Rien ne montre plus clairement la nature déchue. Entendre, sans écouter. Regarder, sans voir. Réfléchir, sans penser. L'arbre millénaire est tombé, et encore, il tombe. L'oeil est encerclé par le ciment des préoccupations. Occupé, hanté, prisonnier; là où jamais ne s'arrêtent les idées.