Les passages qui suivent sont tirés de la collection Tchou-Laffont "les pouvoirs inconnus de l'homme". Par un collectif. (1976) Volume: "les extra-sensoriels".
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Quelques détails curieux cependant, concernant les débuts du développement: Hollingworth (1942) trouve que les enfants à très haut Q.I. ont généralement certaines difficultés à apprendre à écrire et à participer aux jeux et aux tâches qui demandent une bonne coordination neuromusculaire. Il semble que la rapidité de leurs processus mentaux et leur niveau élevé sont des causes d'impatience et de conflit quand une habitude à acquérir exige de la précison (c'est-à-dire de la patience) et une certaine lenteur, qui entrave le jaillissement des idées.
Mais les difficultés dans les rapports sociaux paraissent se manifester surtout chez les "décagénaires", (teen-agers). Elles ne sont probablement alors que l'expression de tensions qui ont commené beaucoup plus tôt. Comme le dit Terman: "Considérez, par exemple, l'enfant de sept ans que nous avions dans notre groupe, dont l'âge mental était de treize ans, et dont la lecture favortie était Le déclin et la chute de l'Empire romain de Gibbon ! Une grante partie de son vocabulaire était absolument inintelligible pour l'enfant moyen de son âge; c'était presque comme s'il eût parlé une langue étrangère". On conçoit les troubles que peuvent entraîner ces difficultés radicales de communication, allant jusqu'à l'impossibilité de communiquer.
La réussite dans les études
Voilà sans doute le point capital: elle n'est pas brillante dans tous les cas, loin de là et, dans les meilleurs des cas, les surdoués ne font pas mieux que les doués.
Terman se montre justement inquiet d'un fait en apparence aussi paradoxal. Il suggère plusieurs explications, dont l'une est très certainement que nos méthodes d'enseignement sont complètement inadaptés aux intelligences supérieures.
Les traits caractéristiques des surdoués sont les mêmes partout, signalés par tous les auteurs: anxiété, insécurité, sentiment d'isolement, maladresse manuelle et physique, souffrance de se sentir des intérêts si différents des autres, désir de lire sans cesse, préférance pour l'autodirection plutôt que pour la direction par un pédagogue. Et plus fort est le Q.I., plus sévères sont les problèmes d'ajustement social, et plus graves sont les persécutions de l'école (Hollingworth, 1942, Parkyn, 1948, Zorbaugh et coll., 1951)
Sans compter la discordance entre l'âge réel et l'âge mental (qui peut atteindre quatre ans) et qui cause déjà de grandes difficultés aux enfants surpanormaux, il faut noter que les surdoués ont tendance à s'isoler, ce qui les rend plus impopulaires encore (surtout sans doute en Amérique!). Ils sont en réalité la proie de pressions si fortes de la part du milieu scolaire qu'on pourrait parfois parler de persécutions; c'est pourquoi beaucoup préfèrent renoncer, oublier leurs talents et rentrer dans la foule anonyme... La gêne qu'ils éprouvent se manifeste dès l'école maternelle (Martison, 1961).
La chute du surdoué
Mais si on ne le fait pas (par exemple, parce que favoriser les jeunes gens qui ont déjà reçu de la nature des dons surabondants serait antidémocratique), il faut savoir que la chute sera rapide et atteindra un pourcentage important de surdoués. C'est pourquoi je poserai à nouveau la question autrement, d'une manière un peu plus emphatique peut-être: a-t-on le droit d'assassiner un génie ?
D'après Goldberg (1965), beaucoup d'adolescents doués réduisent leurs lectures progressivement au cours des années, alors qu'ils sont particulièrement voraces de livres: c'est pour ne pas paraître des "crânes d'oeufs", comme disent les Américains (...)
"Le cas des enfants au Q.I. extraodinairement élevé pose un problème particulièrement grave. Si leur Q.I. est de 180, leur niveau intellectuel à six ans est égal à celui de onze ans; à dix ou onze ans, il n'est guère éloign de celui d'un étudiant quittant l'université.
Le résultat inévitable est que l'enfant de Q.I. 180 doit résoudre un des problèmes les plus difficles d'adaptation sociale qu'aucun être humain ait jamais rencontrés.
"La situation est si grave qu'on pourrait se demander comment il est même possible pour un tel enfant de devenir un adulte socialement normal. Il ne eput espérer que des enfants de son milieu mental l'acceptent car, même s'il connaît bien leurs jeux, son aspect physique est trop immature pour qu'il trouve sa place dans le groupe.
L'enfant à Q.I. de 170 et 180, au contraire, se trouve dans une région de l'intelligence extrêmement dépeuplée. Il n'y a qu'un enfant sur des milliers pour réaliser des chiffres aussi élevés..." D'où l'impossibilité pratique d'avoir des camarades.
Leurs difficultés sont dues, comme le dit Hollingworth en une formule pittoresque, à ce qu'"ils ne peuvent prendre leur parti de la sottise et de la folie" (to accept food gladly) La sensation d'isolement qu'ils éprouvent alors peut provoquer une angoisse grandissante devant les rapports sociaux à établir, cela avec tous les dérèglements qu'on peut imaginer. (...) fardeau obligatoire de l'enfant doué: le sentiment d'isolement, la gêne dans leur besoin dévorant d'apprendre, l'ennui et leur souci très particulier des problèmes éthiques.
Et si les schémas et les tentatives de maîtrise des liens sociaux provenaient de cela: une angoisse grandissante devant les rapports sociaux à établir ?
Il n'est aucun empire humain, Au dessus de moi je ne vois que des oiseaux de mer.
19 novembre 2005
La chute du surdoué
à 00:44