Il n'est aucun empire humain, Au dessus de moi je ne vois que des oiseaux de mer.

15 mars 2006

Monument de la mort - Francisco de Quevedo

DE LA BRIEVETE MEME DE LA VIE, SANS QU'ON Y PRENNE GARDE,
ET DANS LE MALHEUR, ASSAILLIE DE LA MORT

Hier, un songe, et demain, la poussière !
Rien, peu avant, et peu après fumée !
Et je vis d'ambitions, et je me complais,
A peine un point du cercle qui m'enserre !

Bref combattant d'une importune guerre,
A mon secours je suis péril extrême;
Pendant que je m'épuise, en armes même,
Mon corps m'abrite moins qu'il ne m'enterre.

Hier n'est plus, demain hésite encore;
Aujourd'hui passe, il est, il a été,
Et vers la mort son cours me précipite.

Chaque moment, chaque heure sont des houes
Qui, moyennant ma peine et mon souci,
Me creusent au-dedans ma sépulture.

Francisco de Quevedo,
Monument de la mort, traduit de l'espagnol par Claude Esteban, Paris, Deyrolle éditeur, 1992.