DE LA BRIEVETE MEME DE LA VIE, SANS QU'ON Y PRENNE GARDE,
ET DANS LE MALHEUR, ASSAILLIE DE LA MORT
Hier, un songe, et demain, la poussière !
Rien, peu avant, et peu après fumée !
Et je vis d'ambitions, et je me complais,
A peine un point du cercle qui m'enserre !
Bref combattant d'une importune guerre,
A mon secours je suis péril extrême;
Pendant que je m'épuise, en armes même,
Mon corps m'abrite moins qu'il ne m'enterre.
Hier n'est plus, demain hésite encore;
Aujourd'hui passe, il est, il a été,
Et vers la mort son cours me précipite.
Chaque moment, chaque heure sont des houes
Qui, moyennant ma peine et mon souci,
Me creusent au-dedans ma sépulture.
Francisco de Quevedo,
Monument de la mort, traduit de l'espagnol par Claude Esteban, Paris, Deyrolle éditeur, 1992.
Il n'est aucun empire humain, Au dessus de moi je ne vois que des oiseaux de mer.
15 mars 2006
Monument de la mort - Francisco de Quevedo
à 20:18